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L’éternelle « cour des petits » du Vieux Séminaire

6 mai 2011 | Pierre Paul-Hus

L’éternelle « cour des petits » du Vieux Séminaire
Les cris et les rires d’innombrables générations turbulentes d’élèves ont animé les quarts d’heure des récréations dans la cour intérieure du Vieux Séminaire de Québec. Louis-Joseph Papineau, Richard Garneau, Philippe Aubert de Gaspé, Yves Jacques… Nombreux furent les élèves à s’y amuser. Et la tradition se poursuit encore… depuis trois siècles.


Dans la cour de Louis Hébert


Sur le pavé de la « cour des petits » du Séminaire, on peut apercevoir des pierres de granit formant un quadrilatère, indiquant le site de la première maison construite à la haute-ville. Ce n’est qu’en 1991 que les archéologues y trouvèrent enfin les vestiges des fondations de la maison de Louis Hébert et de son gendre, Guillaume Couillard, dans laquelle Mgr François de Laval logea d’abord son Petit Séminaire en 1668. Quelques années plus tard, cet évêque fit démolir la maison et construire les premiers édifices de son Séminaire.


Alors que son Grand Séminaire avait pour but de former des prêtres, son Petit Séminaire fut d’abord un pensionnat pour les jeunes garçons qui étudiaient au Collège des Jésuites, situé pas très loin, sur le site actuel de l’hôtel de ville. Après la Conquête, en 1765, les Jésuites ayant été expulsés par les Anglais, le Petit Séminaire prit la relève du collège et devint une institution d’enseignement classique. Depuis le XVIIIe siècle, les ailes du Vieux Séminaire, aux murs recouverts d’un crépi blanchi à la chaux, encadrent la « cour des petits ». La « cour des grands », qui longeait la rue Port-Dauphin, est aujourd’hui un stationnement.


L’accès à la « cour des petits »



Depuis 1868, près de la basilique, une barrière d’entrée en fonte orne la voie d’accès au Vieux Séminaire. Elle a été réalisée par Philip Whitty, celui-là même à qui l’on doit la belle rampe de la terrasse Dufferin. On remarque, en haut de l’arc central, un médaillon avec les personnages de la Sainte Famille, Jésus, Marie et Joseph qui, selon la volonté de Mgr de Laval, sont les saints patrons du Séminaire.


Puis, au-dessus de la porte cochère de l’aile de la Congrégation qui donne accès à la « cour des petits », le monogramme SME nous rappelle encore que l’institution était unie, à l’époque de la Nouvelle-France, au Séminaire des Missions étrangères de Paris. Dans cette aile, reconstruite en 1823, existe toujours la chapelle de la Congrégation réalisée de 1823 à 1826 d’après les plans de Thomas Baillairgé.

Le capricieux cadran solaire



JiCi Lauzon

Nous sommes rendus dans la carrée « cour des petits ». Au fond de celle-ci se dresse l’aile de la Procure, dont la toiture est surmontée du « clocher du règlement ». Sa cloche sonnait jadis la fin des récréations. Cette aile abrite la partie la plus ancienne du Vieux Séminaire, soit d’impressionnantes caves voûtées et la « cuisine de Mgr de Laval » où se réfugièrent les prêtres lors des bombardements de la guerre de la Conquête, en 1759. Le vieil escalier Saint-Joseph mène à la toute petite chapelle de Mgr Briand, réalisée en 1784-1785 par le sculpteur Pierre Émond. Les branches d’olivier du retable évoquent l’un des prénoms de l’évêque Jean-Olivier Briand.


L’aile de la Procure est surtout célèbre pour son cadran solaire, installé au-dessus de la porte d’entrée. C’est le plus ancien à Québec. Il date de 1773. Comme le veut une vieille coutume européenne, une devise est inscrite en latin dans sa partie supérieure. On peut donc y lire : Dies nostri quasi umbra. Ainsi, le cadran nous rappelle, avec raison, que « les jours fuient comme des ombres ». Bien entendu, le cadran ne peut indiquer l’heure que lorsque les rayons du soleil l’éclairent. Notons que de mars à novembre, le cadran a une heure de retard, car il ignore l’heure avancée de l’Est. Quoique moins célèbres, on retrouve aussi à Québec des cadrans solaires à l’Université Laval et sur les plaines d’Abraham.


Le vénérable orme du prince de Galles


Comme nous le révèlent d’anciennes photographies, longtemps la « cour des petits » fut ombragée par un orme. C’était l’un des ormes les plus célèbres de la ville. N’oublions pas que c’est l’orme d’Amérique qui est l’arbre emblématique de la cité de Québec.


L’orme du Séminaire rappelait un important événement historique. En effet, il avait été planté en 1860 en présence du prince de Galles, qui visitait alors notre ville. Ce fils de la reine Victoria deviendra, plus tard, le roi Édouard Vll. Un banc en bois entourait le pied de l’arbre. Les élèves pouvaient s’y reposer. L’orme, devenu vieux et malade, dut être abattu en 1941


Sous la garde de la Vierge Marie


Le côté oriental de la « cour des petits » est occupé par l’aile des Parloirs. Son petit perron de pierre est surmonté d’une statue de bronze de la Vierge, placée à cet endroit en 1910. Cette aile, reconstruite en 1822, abrita longtemps les parloirs où les pensionnaires recevaient la visite de leurs chers parents, alors que leurs petites amies de cœur devaient se contenter de leur écrire... De vieux escaliers menaient aux dortoirs où les pensionnaires dormaient sous les combles qu’éclairaient les lucarnes. En hiver, les dortoirs étaient si froids que les élèves disaient qu’ils montaient en Sibérie.


Toujours une cour de récréation


Les vieux édifices blancs du Séminaire sont occupés depuis 1987 par la Faculté d’architecture et d’aménagement de l’Université Laval. Les étudiants du Petit Séminaire, qui est devenu, en 2011, le Collège François-de-Laval, ont migré dans les anciens édifices des facultés de droit et de médecine situés à quelques pas plus au nord. Toutefois, lors des récréations et de l’heure du dîner, on les voit surgir dans la « cour des petits » avec leurs ballons. C’est toujours leur cour !


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