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Comment faire exploser le prix des vins ?

4 mars 2011 | Jean-Sébastien Delisle

Comment faire exploser le prix des vins ?
L’achat de grands vins, particulièrement les cuvées des premiers crus classés du bordelais, constitue une source de placement sûre et rentable.


En 2010, l’indice de valeur de ces vins a grimpé de 57 %. En comparaison, la hausse de l’or, valeur refuge par excellence, a été de 31 %. Les prix augmentent sans cesse et les auctions de grands vins atteignent des sommets. Récemment, la collection de Andrew Lloyd Webber, le compositeur de Cats, bien qu’estimée à un maigre 4,1 millions de dollars, s’est vendue 5,6 millions de dollars !



Les prix des vins de Bordeaux s’enflamment, malgré que leurs marchés traditionnels les boudent en réduisant leurs importations. Qu’à cela ne tienne, le commerce du grand vin et du luxe passe désormais par la Chine, un marché énorme composé de beaucoup de « nouveaux riches ». Les occasions d’affaires se multiplient, la meilleure étant sans doute de dénicher une bouteille du millésime 2008 du Château Lafite Rotschild décorée, pour son public asiatique, d’un 8 rouge calligraphié en symbole chinois. La caisse de douze bouteilles de ce vin, achetée en primeur, se transigeait 3 399 $ en mai 2009. En janvier, chez Berry Bros. & Co. à Hong Kong, la même caisse de vin trouvait preneur pour 24 395 $, une augmentation de 618 % en seulement 20 mois !


Il faut dire que Lafite Rotschild a bien joué ses cartes dans cette affaire. Par la voie d’un communiqué, le domaine bordelais a expliqué que l’idée d’estampiller ce symbole chinois se voulait une commémoration : celle du lancement de l’opération asiatique du château, soit le vignoble de 25 hectares de la péninsule de Penglai, dans la province de Shandong. Un projet à long terme axé sur l’ultra qualitatif… et bien représenté dans cette même calligraphie, qui ressemble à deux coteaux adossés, étrangement similaires à ceux de leur terroir de Pauillac.


Mais quiconque est familier avec la culture chinoise sait que le 8 symbolise la prospérité, si bien qu’il n’est que rarement utilisé. Sa fréquence est peu commune dans les numéros de téléphone des chambres d’hôtel, des lignes aériennes ou des entreprises. Les entrepreneurs paient même un supplément s’ils souhaitent que leur ligne affaires comporte ce chiffre, dans l’espoir de s’attirer de bons augures. Vous imaginez la réaction du marché lorsque la nouvelle s’est répandue quant à cette bouteille de vin prestigieux ornée de la « bonne fortune ». Les prix ont explosé. Nous nous devons donc de féliciter les marchands bordelais pour cette astuce commerciale… plutôt que de parler de coïncidences paysagères.


Les affaires sont bonnes pour les grands vins médocains et nous ne sommes pas épargnés : ces hausses nous touchent également. Au Québec, le prix de ces flacons inestimables se compare à celui du marché mondial. Par exemple, la bouteille de Château Monton Rotschild 2005 se vend 965 $ à la SAQ, prix comparable aux meilleures offres que j’ai pu trouver en furetant sur Internet. Mais même sans investir ces sommes importantes (que ce soit pour déguster ou pour investir), on peut boire du bon Pauillac !


À ce titre, je vous recommande d’essayer le Château Batailley, cinquième cru classé de Pauillac, de belle constitution, à l’architecture masculine tout en étant sublimé, bien typé du terroir et de ce cabernet sauvignon du Médoc. On retrouve même des millésimes plus évolués en SAQ : ce sont de véritables petits bijoux. Pour le prix d’un Mouton 2005, vous pourriez faire une verticale de Batailley et déguster un 1990, 1986, 1982 et 1955 !

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