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La chapelle des Ursulines

2 juin 2014 | Jean-Marie Lebel, historien

La chapelle des Ursulines

Là où bat toujours le cœur de la Nouvelle-France



Le long règne du roi Louis XV le Bien-Aimé n’est point tout à fait achevé, du moins dans la chapelle des Ursulines de Québec. Chaque été, de très nombreux touristes, venant de tous les continents, sont émerveillés par cette chapelle dont la riche ornementation remonte aux jours où la ville de Québec était la capitale d’une vaste colonie française qui s’étendait de l’Acadie à la Louisiane. L’année 2014 en est une de célébrations chez les Ursulines de Québec, à l’occasion du 375e anniversaire de leur arrivée et de la canonisation de Marie de l’Incarnation par le pape François.



SOUS LA GARDE DE SAINT JOSEPH



Les visiteurs de la chapelle des Ursulines sont accueillis par une statue de saint Joseph, perchée dans la niche qui domine le fronton de la chapelle. Sa tête est inclinée pour nous voir entrer. C’est saint François de Laval qui mit la chapelle des Ursulines sous la protection de saint Joseph. Dans une niche du mur du jardin, une vieille statue de saint Joseph porte cette inscription à ses pieds : « On m'a choisi pour gardien ».



La chapelle actuelle date de 1901-1902. Elle remplaça celle de 1722. Mais dès qu'on en franchit le seuil, on a le sentiment d'entrer dans un lieu sacré de la Nouvelle-France. Et avec raison, car les chefs-d'œuvre d'ornementation de la vieille chapelle ont été sauvegardés et placés dans la chapelle actuelle. Le majestueux retable en arc de triomphe et son maître-autel, tout de bois, furent réalisés par le sculpteur Pierre-Noël Levasseur de la rue Saint-Louis et ses fils de 1726 à 1736. L'historien de l'art Jean Trudel affirmait que c'est le plus bel ensemble de sculptures sur bois à subsister au Canada de l’époque de la Nouvelle-France.



Une statue de sainte Ursule, la martyre dont on disait qu’elle avait refusé d’épouser Attila le Hun et qui est devenue la patronne des Ursulines, et une statue de saint Augustin, car les Ursulines suivaient la « règle de saint Augustin », occupent des niches au-dessus des portes de la sacristie. C’est naturellement une statue de saint Joseph, tenant l'Enfant Jésus, qui surplombe le retable. Ces belles sculptures, dont la dorure fut méticuleusement réalisée par les Ursulines, sont « d'un âge où l'on travaillait pour des siècles ».





La chaire



À LA MÉMOIRE DE MONTCALM



Appuyée au mur latéral oriental de la nef, la chaire, dont un bel ange à la trompette sonnant le Jugement dernier surmonte l'abat-voix, est aussi une œuvre des Levasseur. C’est du haut de cette chaire que le chapelain du vaisseau amiral britannique y prononça, en 1759, une oraison funèbre à la mémoire du général James Wolfe. Mais si ce dernier fut un peu plus tard inhumé à Greenwich en Angleterre, son adversaire, le marquis Louis-Joseph de Montréal, fut, lui, bel et bien inhumé dans un caveau de la chapelle des Ursulines. D’ailleurs, sur le mur qui fait face à la chaire, deux plaques de marbre nous le rappellent. Celle qui fut placée par le gouverneur Aylmer en 1831 porte cette inscription : Honneur à Montcalm ! Le destin, en lui dérobant la victoire, l'a récompensé par une mort glorieuse ! Sur l'autre plaque, on peut voir l'épitaphe latine composée par l'Académie des inscriptions et belles-lettres de France et envoyée en 1763. Elle débute par ces mots : Ici, repose celui qui vivra éternellement dans les deux mondes.



Comme nous l'indiquent d’autres plaques de marbre, plusieurs autres personnes sont inhumées dans la crypte, dont le maire de Québec Narcisse-Fortunat Belleau et le premier ministre Pierre-Joseph-Olivier Chauveau. Les murs latéraux de la nef sont aussi ornés de tableaux qui, au temps de la Révolution française, avaient été sortis d’églises ou de couvents de France. Ils furent sauvés par l’abbé Philippe-Jean-Louis Desjardins qui les fit parvenir à Québec à son frère, l’abbé Louis-Joseph Desjardins, qui était l’aumônier des Augustines. L’un des tableaux est particulièrement remarquable. Couvrant presque tout le mur intérieur du portail, au-dessus de la porte d’entrée, le grand tableau Jésus chez Simon le Pharisien est une œuvre du peintre parisien Philippe de Champaigne, mort en 1674. « Quand vous le regardez du chœur, en pleine lumière, il vous empoigne et vous ravit », disait Adolphe-Basile Routhier. On raconte que le prince Napoléon, en visite à Québec, vit le tableau et voulait l'acquérir, quel que soit le prix.



LA LAMPE QUI NE S’ÉTEINT JAMAIS



Le chœur des religieuses, où sont alignées les stalles, est séparé de la chapelle publique par une grille. Devant la statue dorée de Notre-Dame-de-Grand-Pouvoir, une lampe votive y brille sans cesse depuis 1724. La « lampe qui ne s'éteint jamais » rappelle toujours le vœu de Madeleine de Repentigny, une « jeune mondaine devenue novice, qui subissait la tentation de retourner au monde ». Elle fit allumer une lampe pour brûler à perpétuité afin de persévérer dans sa nouvelle vocation. Devenue mère Sainte-Agathe, elle se rendit prier devant la lampe chaque jour jusqu'à sa mort en 1739. La lampe d'origine fut remplacée en 1903 par la lampe actuelle, donnée par une Miss Anthon, riche Américaine apparentée à la famille de Repentigny.



UNE ŒUVRE QUI SE PERPÉTUE





L'oratoire où repose le tombeau de sainte Marie de l’Incarnation.



Une porte basse percée dans un mur de la nef de la chapelle donne accès à l'oratoire où a été placé l’austère tombeau de granit noir de sainte Marie de l’Incarnation. Née en 1599 à Tours en France, veuve de Claude Martin, Marie Guyart entra chez les Ursulines en 1631, où elle devint Marie de l'Incarnation, et arriva à Québec en 1639 pour y fonder la première école à l’intention des jeunes filles. Marie de l’Incarnation mourut en 1672, mais, durant la saison scolaire, les cris enjoués des enfants rappellent aux passants que l’école fondée par la Tourangelle est toujours bien vivante.



 



 



 



 



 



 



 



 


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