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Max Gros-Louis : rencontre avec un grand chef

1 novembre 2012 | Johanne Martin

Max Gros-Louis : rencontre avec un grand chef



Rencontre avec un grand chef




Le plus simplement du monde, il assure n’avoir jamais eu peur de qui ou de quoi que ce soit et ne s’être jamais découragé, même devant les causes qui semblaient perdues d’avance. Personnage plus grand que nature, Max Gros-Louis a pratiqué cent métiers, a mené mille batailles, ne laissant personne indifférent sur son passage. Alors qu’une biographie vient d’immortaliser la vie du plus célèbre Huron-Wendat des temps modernes, il jette pour nous un regard sur son parcours personnel et professionnel.


En entrant dans sa résidence, je trouve un Max Gros-Louis en pleine conversation téléphonique avec le réalisateur Daniel Bertolino. Un nouveau projet en vue, me dis-je, alors que sa sœur Louisette est assise à la table de la cuisine, table qui sert à Oné-Onti – ou « bon pagayeur » en huron – de bureau d’où il peut par ailleurs voir, par la fenêtre, les allers et venues au bureau de poste de la réserve.


« Ne vous en faites pas, c’est toujours comme ça ici ! » me prévient celui qu’on appelle aussi le corbeau de Wendake en raison de la chevelure noire qu’arborait son grand-père. Malgré ses 81 ans, sa maison – un véritable musée – est ouverte et son quotidien, fort bien rempli. Tout comme l’auteur Alain Bouchard le fait remarquer dans son bouquin, je constate déjà que rien n’est petit chez l’ancien grand chef de la nation huronne-wendate…


« J’ai toujours eu à cœur de perpétuer la tradition », explique Max Gros-Louis, que l'on l’aperçoit ici durant une séance de purification.
« J’ai toujours eu à cœur de perpétuer la tradition », explique Max Gros-Louis, que l'on l’aperçoit ici durant une séance de purification.

M. Gros-Louis, en jetant un regard sur votre vie, vous la résumeriez comment, vous en diriez quoi ?


J’en dirais que j’en suis fier et que si c’était à recommencer, je ferais la même chose, et peut-être même un peu plus ! Dans les sphères politique et culturelle, je me suis investi à 110 %. Je pense que j’ai pu apporter une contribution considérable en ce qui a trait à la reconnaissance des droits des Premières Nations et que j’ai pu redonner à tous ces gens une certaine fierté. L’essor économique de la réserve a aussi beaucoup retenu mon attention.


Les réalisations dont votre cheminement est jalonné sont nombreuses. Quel a été le plus grand défi que vous avez eu à relever ?


Il y en a trois. D’abord, l’obtention de l’espace nécessaire pour agrandir Wendake n’a pas été une mince tâche, mais on peut dire aujourd’hui : mission accomplie ! Il y a aussi eu le rétablissement du statut d’Indienne pour les Huronnes mariées à un Blanc, statut qu’ont également pu récupérer leurs enfants. Enfin, la création de l’Association des Indiens du Québec a évidemment généré son lot de défis, suivis cependant de retombées très positives.


Les passions qui vous animent ne manquent pas. Y en a-t-il une qui a pris davantage de place dans votre vie ?


La chasse et la pêche, mais pas pour le sport, pour l’aspect culturel. J’ai toujours eu à cœur de perpétuer la tradition et dans notre mode de vie traditionnel, il faut aller chercher à manger. C’est une façon de se rapprocher de la nature, que nous respectons au plus haut point. Mais je suis aussi passionné de cérémonies culturelles et religieuses, de danse – j’ai fondé la troupe Les Hurons, qui a réalisé des tournées triomphales en Europe –, de courses de chiens, de boxe, de hockey…


Quel est le plus grand apprentissage ou la plus grande leçon que vous avez tiré de toutes vos activités ?


Si on veut avoir du succès et si on veut être respecté, il faut respecter les autres, négocier d’égal à égal. C’est une base pour réussir quelque chose. Avant, comme peuple, nous n’étions rien; il a fallu renverser la vapeur. C’est à nous maintenant de décider qui fait partie de notre nation, qui est un Huron. Nous devons nous doter d’un bon code d’appartenance, défini par un référendum impliquant tous les représentants de la nation.


Sur votre route, vous avez côtoyé énormément de gens, dont des personnalités connues. Qui vous a le plus marqué ?

Le pape Jean-Paul II, que j’ai rencontré à deux ou trois reprises, m’a beaucoup impressionné. Il était un être charismatique. Je me souviens des paroles que nous avons échangées, de l’envergure de ses connaissances, de la justesse de son jugement, de son regard incroyablement pénétrant. Je garde également de bons souvenirs de François Mitterrand et de Jacques Chirac, avec qui je m’assoyais dans le tipi, sur mon terrain, pour discuter culture.


Reconnu pour son franc-parler, son accessibilité, son caractère parfois autoritaire, son intelligence, son esprit taquin, sa soif de connaissances, sa capacité d’analyse, son sens politique, ses talents de rassembleur et son envergure peu commune, Max Gros-Louis s’est taillé un destin à sa mesure. Si son parcours est unique, il semble toutefois qu’il pourra compter sur une relève. Au terme de notre entretien, Oné-Onti me tend la carte professionnelle de son fils Kino en le présentant comme… le prochain grand chef de la nation huronne-wendate.




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