La Bourgogne selon Patrick Mallard
Patrick Mallard, vigneron bourguignon, vous fait faire le tour de la côte de Beaune comme vous feriez visiter votre maison. Commune par commune, appellation par appellation, cru par cru.
Patrick Mallard et son épouse Maryse possèdent plus de 40 parcelles de vignes situées sur les communes de Chorey les Beaune, Savigny les Beaune, Aloxe-Corton, Corton, dont les 11 derniers rangs qui jouxtent la côte de Nuits. Patrick Mallard succède à son père, qui a fondé le Domaine Michel Mallard à la fin des années 50. Patrick Mallard a un fils, Michel, qui, après un séjour en Australie, est rentré au bercail pour assurer la relève. Je vous présente donc Patrick Mallard, entre père et fils !
La communion entre l’homme et sa terre. - Photo : Jean Chouzenoux
Faire cette tournée en 4 par 4 avec Patrick Mallard, c’est assister à un cours de géographie, d’histoire, d’ampélographie (science des cépages) et d’œnologie. Le tout avec force détails, appuyé d’une large gestuelle et d’une mimique déconcertante.
La côte de Beaune se distingue par deux activités commerciales principales : les carrières de pierre et la viticulture. C’est tout naturellement à la fin des années 50 que le Domaine Mallard naît de l’union du fils d’un artisan de la pierre, Michel, à la fille d’Émile Gros, vigneron. Tranquillement, au fil des ans et des acquisitions, le domaine prend de l’expansion. Patrick s’initie au métier de la vigne à compter de 1969 et prend la relève.
Rapidement, il en maîtrise tous les aspects et devient agriculteur, œnologue, commerçant, historien, gastronome, mécanicien, livreur… et sa carte de visite pourrait encore s’allonger ! Depuis, le Domaine commercialise une quinzaine d’appellations, dont plusieurs sont offertes au Québec. Pour les grandes occasions, procurez-vous le Corton Renardes, que vous laisserez dormir dans votre cellier quelques années. Ses vignes, de ce Grand Cru réputé, sont situées à 300 mètres d’altitude sur le coteau de Corton (seul grand cru en rouge de la Côte de Beaune), soit l’altitude idéale en terme de chaleur et d’exposition au soleil.
« Le vin, c’est comme déboucher un morceau d’histoire… le génie sort alors du flacon. »
En Bourgogne, deux éléments sont indissociables afin d’établir la renommée d’un vin : son appellation et le nom du producteur. Le meilleur exemple pour illustrer cela demeure le Clos de Vougeot. Ce domaine est d’une superficie 50 hectares, que se partagent près d’une trentaine de propriétaires. Pour départager le bon grain de l’ivraie, il importe de connaître les producteurs qui se démarquent des autres par leur travail rigoureux et leurs hauts standards de qualité, pas uniquement par le prestige de l’appellation. En ce sens, les vins du Domaine Mallard sont gages de qualité et à des prix raisonnables, au demeurant. L’élément essentiel qui distingue tout grand producteur est sa passion. À 60 ans bien sonnés, Patrick Mallard possède la flamme… et ses yeux s’illuminent quand il vous dit : « Je sors ce qu’il y a de meilleur de la terre et, ensuite, je le transmets aux gens ! »
Photo : Jean Chouzenoux
L’autre art qu’il faut maîtriser est celui de savoir tirer le maximum de son terroir et on devine ici la communion entre l’homme et sa terre. Il faut aussi maîtriser l’histoire de sa région, connaître comment les ancêtres ont cartographié le territoire pour savoir où et quoi planter. En ce sens, Patrick Mallard est en parfait contrôle; il est fier de son coteau, il le connaît intimement, il sait comment planter la vigne, il a appris de son père les erreurs à ne pas faire et quand il vous avoue candidement que « le vin, c’est comme déboucher un morceau d’histoire… le génie sort alors du flacon », vous êtes porté à le croire.
Enfin, faire du vin, c’est savoir composer avec les aléas de la nature. Donnée non maîtrisable quand la météo se déchaîne, il faut alors savoir racheter les affres de cette météo capricieuse par une maîtrise technique hors du commun. Par exemple, vendanger au moment judicieux, vinifier en adaptant certains paramètres comme la durée de la vinification, la température, les assemblages, etc. En 2012, 50 % de la récolte a été détruite par les orages violents et les maladies de la vigne qui en ont découlé. Cette année, les fortes pluies de juillet et la grêle du mois d’août ont endommagé une bonne partie de la récolte. Heureusement, l’ensoleillement et de fortes chaleurs en septembre ont aidé à cicatriser quelque peu les plaies.
Après deux heures à naviguer dans un océan de vignes et à contempler ce paysage bucolique, nous voici en cave pour une dégustation des vins de la récolte précédente, qui sont encore en barriques, de même qu’une verticale de quelques crus, c’est-à-dire une dégustation du même vin sur quelques années, dont le Corton Renardes… jusqu’au sublime millésime 1999 !
Nous croisons le fils, Michel, qui s’implique auprès du paternel depuis 2005. Il supervise également la vinification d’un autre domaine réputé de la côte de Nuits. Tous deux ont leur vision des choses du vin et nul doute que la renommée du domaine est assurée pour encore quelques décennies.
Patrick Mallard est un ami du Québec. Il y fait un pèlerinage quasi annuel. Dernière visite en date, le 24 octobre 2012 à Montréal, pour une soirée hommage à Champlain Charest, l’un des plus illustres amateurs et collectionneurs de vin en Amérique. Et qui dit octobre en Bourgogne, dit période cruciale de vinification. C’est quand même l’âme joyeuse, mais l’esprit préoccupé par le travail en cave, qu’il a accepté de faire ce saut de 48 heures au Québec. La passion, vous disais-je ! En fait, si j’avais à résumer en une image ce qui caractérise Patrick Mallard, homme du vin, je dirais : « C’est bien d’être un homme important, mais c’est plus important d’être un homme bien !
Pour en savoir davantage : domaine-mallard.com