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[LES MAIRES DE QUÉBEC] Andrée P. Boucher : Mairesse de Québec de 2005 à 2007

30 mai 2013| Donald Charette

[LES MAIRES DE QUÉBEC] Andrée P. Boucher : Mairesse de Québec de 2005 à 2007

Andrée P. Boucher a été LA « mairesse » de Sainte -Foy, de la Ville de Québec et du Québec durant sa longue – et très contrversée – carrière qui s’est étalée sur une vingtaine d’années . Mme Boucher , c’est en quelque sorte la version québécoise de Margaret Thatcher, la Dame de fer de Sainte-Foy.

Cette enseignante, qui affichait déjà

des opinions bien arrêtées durant ses

études au Collège Jésus-Marie, s’est

rapidement intéressée à la politique

municipale. Elle s’est d’abord illustrée

comme citoyenne au conseil municipal

de Sainte-Foy, avant de devenir la

hantise des élus. L’ancienne ville de la

banlieue de Québec vivait une époque

trouble et son corps policier était en

pleine déroute. Elle s’est fait élire

conseillère en 1984, puis s’est présentée

à la mairie en 1985 dans le but d’y

opérer son premier grand ménage.

Mme Boucher se faisait appeler la

« mairesse » et cette désignation

lui colla à la peau jusqu’à son décès,

en 2007. Lors de son premier voyage

officiel en France, elle insista d’ailleurs

pour qu’on la présente ainsi, et

non comme « la maire » (mairesse

désignant traditionnellement la

femme du maire).

Andrée P. Boucher, à l’époque où elle était la mairesse de Sainte-Foy.
Andrée P. Boucher, à l’époque où elle était la mairesse de Sainte-Foy.

Elle régnera sur les destinées de Sainte-

Foy de 1985 à 2001, soit durant 17 années,

en y imposant son style de « maîtresse

d’école ». Les luttes qu’elle mènera seront

épiques, la plus célèbre portant sur la

construction de son prestigieux hôtel de

ville, un projet de 42 millions de dollars

qui a fait couler beaucoup d’encre. Pour

faire passer son règlement d’emprunt,

la mairesse procédera à l’ouverture des

registres municipaux. Malgré des refus

retentissants de la population, elle

décidera de construire ce qui, dans l’esprit

populaire, était devenu le Taj Mahal de

Sainte-Foy. L’administration de

Mme Boucher était pourtant marquée

du sceau de l’austérité. On raconte, par

exemple, qu’elle se contentait d’un demisandwich

le midi à son bureau et payait

elle-même ses crayons. Paradoxalement,

elle aimait le beau et le chic, et ne lésinait

pas quand venait le temps de construire

du solide, comme en témoignent son hôtel

de ville et le Palais Montcalm. Cette mère

de famille de trois enfants, également

grand-mère, faisait de la microgestion et

décidait de tout dans « son » hôtel de ville.

Par exemple, elle magasinait elle-même les

oreillers pour « ses » pompiers chez Simons !

Si la promenade Samuel-De Champlain

existe aujourd’hui, c’est sans doute parce

que la mairesse a lancé le mouvement en

transformant la Plage-Jacques-Cartier. On

l’a vue patrouiller sur la plage et se lancer à

la poursuite de citoyens à vélo !

Lors de son assermentation en 2005.
Lors de son assermentation en 2005.

LE COMBAT DE SA VIE

Indécrottable Fidéenne, Mme Boucher a

mené le « combat de sa vie » contre les

fusions forcées au cours des années 2000

à 2002. On la verra dénoncer ce coup de

force sur toutes les tribunes, en véritable

pasionaria de la banlieue. En 2001, elle

annonça son intention de se présenter à la

mairie de Québec pour défaire les fusions.

Il n’en fallut pas plus pour que Jean-Paul

L’Allier décide de poursuivre sa carrière

municipale. Il l’emporta sur son éternelle

rivale. Un référendum sur la défusion fut

tenu à Sainte-Foy, mais n’obtint pas le

niveau de votes requis. La fusion de la

grande ville de Québec fut consommée.

En compagnie de Robert Lepage, qui signe le livre d’or à la mairie de Québec en août 2006.
En compagnie de Robert Lepage, qui signe le livre d’or à la mairie de Québec en août 2006.

Le 3 juillet 2007, à l’occasion de la remise du droit de cité, en compagnie du Royal 22e Régiment.
Le 3 juillet 2007, à l’occasion de la remise du droit de cité, en compagnie du Royal 22e Régiment.


Andrée P. Boucher effectua alors le

virage le plus spectaculaire de sa carrière

publique et se lança à la course à la

mairie de Québec. La campagne de 2005

fut des plus étonnantes. Elle affronta

l’avocat-vedette Marc Bellemare, donné

gagnant dès le départ, et Claude Larose du

Renouveau municipal de Québec. Portée

par sa notoriété, elle mena une campagne sans pancartes, sans

programme, sans équipe… et rafla 46,29 % des voix. La parfaite

anticampagne. L’impensable se produisit… Mme Boucher dirigea

Québec.

Lors de l’inauguration du Palais Montcalm en 2007. Ci-haut : en compagnie de l’ancien maire de Québec, Jean Paul L’Allier, et de Bernard Labadie, directeur musical des Violons du Roy. Ci-bas : en compagnie de Michel Després, ex-ministre responsable de la région de la Capitale-Nationale.
Lors de l’inauguration du Palais Montcalm en 2007. Ci-haut : en compagnie de l’ancien maire de Québec, Jean Paul L’Allier, et de Bernard Labadie, directeur musical des Violons du Roy. Ci-bas : en compagnie de Michel Després, ex-ministre responsable de la région de la Capitale-Nationale.

Son rôle dans la suite des choses sera déterminant. « Elle a

vraiment cimenté la Ville de Québec et l’a défendue sur toutes

les tribunes », affirme son ex-attaché de presse, Paul-Christian

Nolin, qui est maintenant aux côtés du maire Labeaume. Il ajoute

« qu’elle a fusionné l’esprit des employés de la Ville en valorisant le

travail des uns et des autres. Québec regardait parfois de haut les

petites villes. »

Celle qui avait dénoncé la propension de son prédécesseur aux

voyages en France effectua une première sortie à Bordeaux et à

Paris en 2005; 400e anniversaire de Québec oblige ! Son caractère

affable et naturel charma les dignitaires, mais les médias retinrent

surtout sa flamboyante robe, une création de son couturier

préféré Yves-Saint-Laurent, robe qui fit le délice des caricaturistes.

Lors de la mise en eau de la fontaine de Tourny en juillet 2007, en compagnie de Donald et Richard Simons, l’auteure Marie Laberge, l’ancien premier ministre Jean Charest, Peter Simons, Fatima Houda-Pepin, députée de La Pinière, et Jacques Langlois, alors président de la Commission de la capitale nationale.
Lors de la mise en eau de la fontaine de Tourny en juillet 2007, en compagnie de Donald et Richard Simons, l’auteure Marie Laberge, l’ancien premier ministre Jean Charest, Peter Simons, Fatima Houda-Pepin, députée de La Pinière, et Jacques Langlois, alors président de la Commission de la capitale nationale.

Bourreau de travail, Mme Boucher fut foudroyée, à son domicile,

par une attaque le 24 août 2007, soit 20 mois après son élection.

Elle avait 70 ans. Son décès provoqua un grand chagrin dans la

population, qui avait appris à aimer « la mairesse du peuple ».

Ses funérailles, célébrées à la basilique-cathédrale Notre-Dame

de Québec par Mgr Marc Ouellet et transmises à la télé, furent

mémorables et très touchantes. Des milliers de personnes

suivirent le cortège funéraire de Mme Boucher, qui fut enterrée,

cela allait de soi, au cimetière Notre-Dame-de-Foy.

Mme Boucher était férocement hostile aux dépenses jugées

extravagantes et s’opposait à une candidature olympique et au

sauvetage des Nordiques; elle n’aurait sûrement pas embarqué

dans l’aventure d’un nouvel amphithéâtre. On a tendance à

l’oublier, mais « la Dame de fer » avait entrepris de modifier les

conditions de travail des employés de la Ville, conditions qu’elle

jugeait excessives. Ce dossier constituait son gros chantier en

2005. Quand elle dénonçait avec éloquence l’horaire de travail des

pompiers, on croyait entendre… Régis Labeaume. Mais cela, c’est

une autre histoire.

Dans l’histoire de la Ville de Québec, elle sera donc à la fois celle

qui l’a combattue avec fougue… avant de décider d’en faire une

réussite.

PHOTOS : ARCHIVES DE LA VILLE DE QUÉBEC

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