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Les compagnies d’assurance – Un moteur économique à la « Puissance Onze » à Québec et à Lévis

4 avril 2013| Donald Charette

Les compagnies d’assurance – Un moteur économique à la « Puissance Onze » à Québec et à Lévis

La grande région de Québec et de Lévis peut s’appuyer sur 11 sièges sociaux de compagnies d’assurance qui font travailler plus de 10 000 personnes. De quoi justifier son titre de « capitale de l’assurance ».

Ces entreprises font partie du paysage

économique depuis si longtemps qu’on a

tendance à oublier qu’elles forment aussi

l’ossature économique de la capitale. D’une

discrétion légendaire, elles ont pris leur place

dans l’espace public depuis quelques années,

car leur croissance a généré des problèmes de

recrutement.

En 2007, les 11 compagnies ont formé Puissance

Onze et ont créé le Centre de développement

en assurances et services financiers Québec et

Chaudière-Appalaches (CDASF). Son directeur

général, Gilles Juneau, explique que si ces

compagnies concurrentes ont senti le besoin

de s’allier, c’est pour intéresser les étudiants

au monde de l’assurance, promouvoir le

bilinguisme et, de façon générale, faire

connaître l’industrie. Et quelle industrie !

(Voir les données en encadré.)

En termes de rayonnement, soulignons

que parmi les 10 plus grands assureurs de

personnes au Canada, 4 d’entre eux

sont situés dans la région de Québec. Au

Québec, six de ces entreprises occupent

près de 30 % des assurances de dommages

et 44,5 % des assurances de personnes.

Donnée non négligeable : le salaire

moyen est de 49 000 $, 61 000 $ avec les

avantages sociaux. Si les compagnies

d’assurance ont grandi grâce à des

acquisitions, la ville de Québec demeure le

coeur de leurs activités.

« Il y a cinq ans, il n’y avait pas beaucoup

de monde qui parlait de notre secteur

d’activité, poursuit le directeur général de

Puissance Onze. Notre message, c’est :

“Regardez la forêt, nous avons à Québec

des entreprises très solides, capitalisées,

et qui sont établies, dans certains

cas, depuis plus de 100 ans, telles que

l’Industrielle Alliance, qui a 121 ans.” »

Les fusions et les acquisitions ont fait

disparaître des assureurs comme les

Prévoyants et l’Union Commerciale, qui

se sont retrouvés dans le giron de grosses

compagnies. Les assureurs peuvent

miser sur des clientèles bien établies.

C’est le cas avec Desjardins et son

réseau de caisses, la SSQ, très présente

dans les conventions collectives, ainsi

que La Capitale et la fonction publique

québécoise.

Pour combler leurs besoins de maind’oeuvre,

les assureurs se sont arrimés

au réseau de l’éducation. Les cégeps

de Sainte-Foy et de Lévis-Lauzon

offrent maintenant des formations

spécialisées en assurance. Le Centre

de développement en assurances et

services financiers Québec et Chaudière-

Appalaches a bâti, par ailleurs, une

formation accessible en ligne pour les

employés.

Pour combler leurs besoins de maind’oeuvre,

les assureurs se sont arrimés

au réseau de l’éducation. Les cégeps

de Sainte-Foy et de Lévis-Lauzon

offrent maintenant des formations

spécialisées en assurance. Le Centre

de développement en assurances et

services financiers Québec et Chaudière-

Appalaches a bâti, par ailleurs, une

formation accessible en ligne pour les

employés.

C’est une constante qui ressortait

d’ailleurs dans le sondage annuel de la

Chambre. Selon les chiffres de la CDASF,

la proportion d’employés connaissant

l’anglais varie entre 20 et 40 %, alors

qu’on vise 50 %.

Bien ancrés à Québec, les assureurs

sont aussi des entreprises citoyennes

exemplaires. Les sièges sociaux consacrent

plus de 3,5 millions de dollars en dons et

commandites chaque année à différentes

causes, des deux côtés du fleuve.

Si la région de Québec a si bien traversé

les tempêtes économiques, elle le doit,

pour une bonne part, à cet important

pilier que constituent les « onze

puissances ».


LES ASSURANCES :

UN « MOUVEMENT ÉCONOMIQUE »

La forte présence des compagnies

d’assurance permet à Québec « de garder

ses cerveaux », affirme le président

du conseil et chef de la direction

de La Capitale groupe financier,

M. René Rouleau.

Nouvel édifice abritant le siège social de La Capitale
Nouvel édifice abritant le siège social de La Capitale

La Capitale emploie directement

3 000 personnes au siège social, souligne

encore M. Rouleau, « cela garantit de bons

emplois, avec une paie aux deux semaines

assurée ». Mais il faut voir aussi que

cette activité génère un « mouvement

économique » qui soutient des emplois

de qualité en périphérie : informatique,

gestion des immeubles, formation dans

les cégeps et à l’Université Laval, sans

compter les évaluateurs de dommages,

les garagistes, les entreprises de

communication…

La Capitale s’est fortement diversifiée et

gère actuellement des actifs de plus de

quatre milliards de dollars. René Rouleau

rappelle les débuts, plus que modestes, de

la « Mututelle des employés civils », il y a

75 ans. « À l’origine, les gens cherchaient

tout simplement à avoir un “secours

funéraire” en mettant 10 cents de côté

sur leur paie pour un enterrement.

C’était 150 $ pour un homme, 75 $ pour

une femme. » Pas de quoi intéresser de

grosses compagnies d’assurance.

La Capitale, une mutuelle, a grandi

avec le secteur public québécois et a

largement profité de la Révolution

tranquille. Elle fournit des services à

236 000 mutualistes dispersés dans les

ministères, mais également dans les

secteurs de la santé, de l’éducation,

des municipalités. Son approche

basée sur un service à la clientèle

impeccable, sur des profits qui ne sont

pas faramineux, mais constants, fait

recette en Ontario et dans d’autres

provinces canadiennes. « Nous essayons

d’inculquer notre culture d’entreprise

et cela marche », résume René Rouleau.

La Capitale est aussi une entreprise

citoyenne exemplaire qui investit dans

la communauté et incite ses employés à

s’impliquer dans une cause sociale.


DES COMPAGNIES AUSSI SOLIDES QUE LE CAP DIAMANT

« Avec la présence à Québec des services financiers et du

gouvernement, nous avons un tiers de stabilité. C’est une des

raisons du succès de notre région. Les Exfo, Taleo, Beenox et

le secteur pharmaceutique sont venus s’ajouter à une région

qui allait déjà bien. C’est ce qui explique un taux de chômage

de moins de 5 %. »

Yvon Charest, président de l’Industrielle Alliance, est bien

placé pour analyser l’économie de la capitale. Depuis son

bureau de la Grande Allée, il dirige une entreprise qui emploie

plus de 4 000 personnes au Québec, au Canada et aux États-

Unis. Les sept édifices de la compagnie d’assurance à Québec

regroupent 2 400 employés. Les racines d’Yvon Charest sont

profondes, autant avec la ville de Québec qu’avec l’entreprise

où, jeune actuaire, il est entré, il y a 34 ans.

Siège social de l’Industrielle Alliance
Siège social de l’Industrielle Alliance

Pour illustrer le poids des compagnies d’assurance, il avance deux

données : « Les assurances représentent 12 % du PIB régional, alors que

la fonction publique fait 19 %. Si on prend l’indice de concentration

géographique, on parle de 1,5 % par rapport à 2,2 % pour le secteur

public », analyse-t-il.

Des raisons historiques expliquent la présence forte et soutenue des

compagnies d’assurance. Elles se sont développées par consolidation,

par exemple l’Industrielle et l’Alliance ont fusionné en 1987, la

Laurentienne a été avalée par Desjardins, pendant que la Sun Life, elle,

déménageait à Toronto, etc. En parallèle, des entreprises étrangères,

comme La Prudentielle et la Métropolitaine, se sont repliées et ont

vendu leurs opérations canadiennes. « Québec, à la fin de la journée,

s’en est toujours bien sortie », observe le PDG. Par ailleurs, Yvon

Charest souligne à larges traits l’apport de l’Université Laval dans le

développement de la filière assurances. On y offre depuis longtemps un

cours d’actuariat et l’institution y forme des administrateurs.

DES DÉFIS À RELEVER,

MAIS À QUÉBEC POUR RESTER.

Le secteur de l’assurance est, de prime

abord, moins sexy que celui des jeux vidéo

ou du spectacle, et les 11 compagnies

logées à Québec ont connu des problèmes

de recrutement. Pour pourvoir 40 postes

d’informaticiens, l’Industrielle Alliance

a dû, par exemple, se tourner vers

l’Europe. La compagnie s’est arrimée avec

l’Université, a offert des bourses, organisé

des stages en entreprise, développé des

cours avec les cégeps et travaillé sur sa

réputation d’industrie un peu poussive.

Cet activisme a porté ses fruits, mais Yvon

Charest insiste sur la difficulté de trouver

des employés bilingues. Quand on sait

que l’Industrielle Alliance réalise 60 %

de ses affaires hors Québec, on mesure

l’importance de parler anglais. « Je suis

de ceux qui croient que l’enseignement

de l’anglais ne se fait pas au détriment

du français », souligne le PDG, qui estime

que le système éducatif devrait produire

des finissants bilingues. Néanmoins,

l’entreprise est implantée à Québec et

est là pour y rester. « Nous n’avons aucun

intérêt à déménager pour deux raisons :

la proximité des maisons d’enseignement

et, bien sûr, la qualité de vie. »


Bien que La Capitale fasse partie du

palmarès des 50 meilleurs employeurs au

Canada (évaluation faite par sondage)

et que cette réputation attire ceux qui

cherchent un emploi, l’entreprise doit

faire face au départ à la retraite de la

cohorte des boomers et à la concurrence

des autres assureurs, admet René

Rouleau. Néanmoins, La Capitale a assez

bien tiré son épingle du jeu en termes

de main-d’oeuvre. « Pour nous, c’était un

choix très clair de s’établir là où on est né,

sur la colline Parlementaire. C’est à partir

de Québec qu’on va se consolider. »

Les 11 sièges sociaux de compagnies d’assurance à Québec

  • Desjardins Groupe d’assurances générales
  • Desjardins Sécurité financière
  • Groupe Ledor
  • Industrielle Alliance Assurances et services financiers
  • Industrielle Alliance Assurances auto et habitation
  • La Capitale Assurances et services financiers
  • La Capitale Assurances générales
  • L’Union canadienne
  • Promutuel
  • SSQ Assurances générales
  • SSQ Groupe financier

Quelques données sur le monde de l’assurance à Québec

  • Masse salariale : 553 millions de dollars
  • Sommes versées à des fournisseurs : 213 millions de dollars
  • Progression du volume d’affaires : 20 % de 2008 à 2011
  • Parc immobilier : 900 millions de dollars
  • Actif sous gestion à Québec : de 31 milliards en 2005 à 74 milliards de dollars en 2011

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