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[HISTOIRE] Dans le Vieux-Québec, vivre l’histoire chaque jour

14 septembre 2023| Jean-Marie Lebel, historien

[HISTOIRE] Dans le Vieux-Québec, vivre l’histoire chaque jour
Sur la photo : l'édifice du Cercle de la Garnison et ses jardins ombragés. ©Mélanie Jean, Destination Québec cité

Les touristes et visiteurs des dimanches après-midi d’été, cherchant à se faufiler dans les encombrées rues Saint-Jean et Saint-Louis, et à contourner les travaux ou rues fermées, ou encore à s’y retrouver dans les nombreuses rues à sens unique pour finalement atteindre leurs objectifs, doivent plaindre les citoyens du Vieux-Québec de résider dans cet arrondissement historique… Et pourtant, il y fait bon vivre ! Depuis des générations, des individus et des familles en font leur milieu de vie. C’est que le Vieux-Québec possède ses havres de paix, ses espaces de recueillement, ses lieux de mémoire. L’esprit et l’âme s’y nourrissent et s’y reposent. La présence des anciens n’est jamais bien loin. Au cours des ans, l’auteur a vécu chacune des expériences racontées dans cette chronique. Qualité garantie !




Vous avez déjà remarqué que chacun des kiosques de la terrasse Dufferin s’est vu attribuer un nom qu’il porte fièrement. Notre préféré est le kiosque de la princesse Louise, celui dont le rez-de-chaussée est occupé par un « comptoir de crème glacée ». En belle saison, pourquoi ne pas s’installer sur les bancs publics de l’étage supérieur ? C’est un excellent observatoire. Tout en dégustant un bon gelato aux framboises, on regarde défiler les touristes à nos pieds. On voit tout sans être vu. Les touristes passent, les Vieux-Québécois demeurent.


Le kiosque de la princesse Louise de la terrasse Dufferin. ©Aurélie & Yann_Amoureux du Monde



Tous les livres nous paraissent plus lumineux lorsqu’on les lit dans la belle salle de lecture de la bibliothèque de la Maison de la littérature. Par les hautes fenêtres gothiques de cet ancien temple religieux méthodiste du milieu du XIXe siècle, entre en abondance la lumière du jour. On n’aurait pas pu espérer plus belle conversion d’une vieille église en bibliothèque accueillante. Tout y élève l’esprit.


La Maison de la littérature ©Marie D Martel, Wikipedia



Pique-niquer sur les verdoyants glacis de la citadelle : des gens le font depuis le XIXe siècle. On appelle « glacis » les pelouses qui de l’avenue Saint-Denis montent vers la citadelle. Les points de vue y sont magnifiques. On dit que ce sont les Anglais qui ont amené à Québec la coutume de pique-niquer. Le sandwich n’a-t-il pas d’ailleurs été inventé par un certain monsieur Sandwich ?

À l’ombre des grands arbres du jardin des Gouverneurs, assis sur un banc public avec le journal du matin entre les mains, lever la tête à l’occasion pour regarder passer les touristes, voilà un moment de repos coutumier dans ce parc, aux abords du Château Frontenac, qui n’a pas changé depuis des lustres. Et son grand obélisque, le monument Wolfe-Montcalm, inauguré en 1828, n’est-il pas le plus ancien monument commémoratif à Québec ?


Le jardin des Gouverneurs © Destination Québec cité



Alors que partout ailleurs, les tabagies sont devenues des dépanneurs, le Vieux-Québec a encore sa tabagie de la rue De Buade. Alors que le portrait du fondateur orne un mur, l’un ou l’autre de ses petits-fils est debout à l’arrière du long comptoir. En notre époque où le milieu du commerce est chambardé par les Amazon de ce monde, il y a quelque chose de rassurant d’entrer dans cette vieille boutique de « tabaconistes ».

Chaque saison change nos états d’âme. Il y a donc un parc pour nous faire rêver chaque saison, le parc Montmorency au printemps, le parc de l’Esplanade à l’été, le parc du Cavalier du Moulin à l’automne et le jardin des Gouverneurs en hiver.

Pour se mettre en forme et respirer le grand air du large, rien ne vaut une bonne marche sur la promenade des Gouverneurs qui, accrochée au cap Diamant, va de la terrasse Dufferin aux plaines d’Abraham. Les points de vue sur le fleuve sont à couper le souffle (il y a beaucoup de marches !) et le coup de canon de midi nous fait tressaillir (on a le cœur sensible).

Le Vieux-Québec a toujours sa bibliothèque victorienne. Depuis un siècle et demi, le décor a bien peu changé dans la bibliothèque de la Literary and Historical Society of Quebec , au second étage du Morrin Centre. Les portraits des anciens nous regardent. Une horloge plus que centenaire marque le temps. Attablé à une table, inspiré, j’y ai rédigé plusieurs de mes textes. Si vous aimez lire les classiques britanniques ou les nouveautés américaines, vous trouverez raisonnable le tarif d’adhésion annuelle. Et vous pourrez emprunter un bon vieux Dickens.

Prendre un bon repas sur une terrasse constitue un légitime plaisir de nos étés trop brefs. Dîner dans les jardins du Cercle de la Garnison constitue une faveur exceptionnelle. À l’abri des bruits de la rue, encadrés par les ailes du bel édifice, ombragés par de beaux arbres, dont un majestueux grand orme, ces jardins constituent un enchanteur refuge. Si vous connaissez des membres du Cercle de la Garnison, soyez gentils avec eux et ils vous y inviteront.

Pour se recueillir, il y a les dimanches matin à l’atmosphère d’autrefois. On y entend longuement retentir les cloches de la basilique-cathédrale Notre-Dame de Québec et de la cathédrale Holy Trinity. Des gens endimanchés se rendent aux offices. À la sortie, ils s’en retourneront dans leurs vieilles rues, dont certaines remontent aux temps de Champlain ou de Frontenac, et ils rentreront dans leurs maisons séculaires. Que viennent les dimanches après-midi et leurs invasions de touristes, les Vieux-Québécois sauront toujours où se réfugier. Ils ont fait du Vieux-Québec leur port d’attache.











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