Dès la fin de ses études, en 2012, Jean-Sébastien Lecompte recherche une nouvelle façon d’exercer la pharmacie. Il y a trois ans, il entend parler d’un modèle qui s’est implanté dans l’Ouest canadien et qui se déploie également en Ontario. S’inspirant de ce qui s’y fait et des pratiques qu’il a lui-même observées, voilà qu’il élabore son propre concept de cliniques en pharmacie. Cette formule, qui se démarque, représente aujourd’hui sa source de motivation.
« Au Québec, on commence graduellement à voir l’amé- nagement d’espaces consacrés à la clinique dans les pharmacies, mais en 2021, je faisais figure de précurseur, commente le jeune visionnaire. J’ai d’abord créé la clinique de diabète, puis celles de santé respiratoire, de migraine et d’hypothyroïdie. On pense maintenant à lancer officiellement notre clinique générale à compter de l’an prochain, le modèle appelé à devenir le plus répandu au pays. »
ÉLARGIR SES HORIZONS
Propriétaire d’une pharmacie de 2013 à 2015, Jean- Sébastien décide un jour de la vendre et de prendre une pause de l’entrepreneuriat avant d’y revenir en 2019. Durant cette période de quatre ans, il découvre l’univers de l’enseignement. Il donne des cours au programme d’assistance technique en pharmacie au Centre de formation professionnelle Fierbourg, de même qu’à l’Université Laval, où il continue d’ailleurs d’agir comme professeur à l’occasion.
« De 2015 à 2019, j’ai aussi été pharmacien remplaçant, ce qui m’a permis de faire le tour du Québec jusqu’à la baie James pour découvrir différentes manières de faire les choses. Cette expérience m’a amené à réaliser ce que j’aimais et ce qui ne me plaisait pas dans les milieux où j’ai travaillé, raconte celui qui a choisi d’élargir ses horizons. Durant ce passage, je dois admettre que j’ai également beaucoup appris sur moi-même et gagné en sagesse ! »
LE DÉFI DE CONCRÉTISER LE MODÈLE
Convaincu qu’il est possible d’attirer et de fidéliser la clientèle autrement qu’en promouvant les rabais de la semaine, le propriétaire de la Pharmacie Jean-Sébastien Lecompte affiliée à Uniprix a néanmoins dû relever plusieurs défis pour mettre en place son modèle d’affaires. Il lui a fallu innover pour valoriser le rôle du pharmacien et trouver la façon d’opérationnaliser les services en vue de les rendre à la fois fonctionnels, rentables et utiles pour la population.
« Précisons d’emblée qu’il s’agit de services pour lesquels la Régie de l’assurance maladie du Québec rémunère déjà les pharmaciens et qui sont encadrés par la loi. L’enjeu consiste à instaurer la stratégie avec le contexte, la législation et la tarification existants. En tant que gestionnaire, le défi qui se pose est de concrétiser le tout », note le professionnel, qui détient une maîtrise en administration des affaires, profil gestion pharmaceutique, obtenue en 2020.
Jean-Sébastien Lecompte, pharmacien propriétaire
Bianka Turgeon, pharmacienne
© Marjorie Roy, Optique Photo
ACCÉDER AUX DIVERSES CLINIQUES
Les personnes qui n’ont pas de médecin de famille et de suivi régulier, qui ont une condition de santé chronique – comme le diabète ou la migraine – qui n’est pas stable ou qui nécessite un ajustement font partie de la clientèle visée par Jean-Sébastien Lecompte. Outre ceux qui en font la demande, la pharmacie effectue aussi du recrutement actif à l’interne en vérifiant l’état de santé des individus et en les invitant, au besoin, à s’inscrire à l’une de ses cliniques.
« Quand un patient adhère au service, une assistante technique en pharmacie appelle la personne, procède à une collecte de données complète, puis fixe un rendez-vous pour que le suivi s’amorce avec le pharmacien. Ce dernier convient de la fréquence de ce suivi et de son intensité, détaille l’éducateur agréé en diabète. On détermine si des prises de sang sont requises, des médicaments à ajuster, et après, on suit le patient régulièrement. »
FORMER ET BIEN S’ENTOURER
De plus en plus connues, les cliniques proposées par la pharmacie enregistrent une hausse constante de fréquentation. Dans les circonstances, le propriétaire met à contribution ses principales forces en gestion : la formation et le mentorat, ce qui lui permet de déléguer des responsabilités à son équipe. Les pharmaciennes, tout comme les assistantes techniques en pharmacie, sont donc fortement engagées dans la démarche afin d’assurer son succès.
Jean-Sébastien a également cru bon établir un système de gouvernance démocratique. Un comité de gestion a ainsi été constitué pour soutenir la compétitivité de l’entreprise. Lorsque des décisions doivent être prises pour l’ensemble des services – laboratoire, magasin, cosmétiques, comptabilité –, les quatre gestionnaires discutent de la voie à suivre. Tous les mois, ils se réunissent et chacun d'eux dispose d’un droit de vote qui équivaut à 25 %.
« Être propriétaire unique fait reposer les bons comme les mauvais coups sur les épaules d’un seul individu. Le comité de gestion a l’avantage de me forcer à être performant pour le bien de l’entreprise, et le comité, de son côté, est obligé de l’être au bénéfice du propriétaire. On parle d’un mode de gouvernance qui est gagnant-gagnant pour tout le monde. En soi, cette formule, c’est aussi innovant comme façon de faire les choses », conclut M. Lecompte.