Relever le défi de la conciliation
Même si une bonne partie de la communauté juive d’origine a quitté Québec à l’époque de la Révolution tranquille, il subsiste toujours, dans la capitale, quelque 140 unités familiales associées à ce groupe ethnique et religieux. Unies dans leur mode de vie, elles sont parvenues à se bâtir un quotidien fait d’un savant mélange de culture québécoise et d’attachement à leurs convictions profondes.
« Il faut savoir que la communauté juive de Québec est l’une des plus vieilles d’Amérique du Nord, ses débuts remontant à 250 ans environ, révèle d’entrée de jeu son rabbin, Dovid Lewin, arrivé chez nous avec son épouse en 2006. Beaucoup de Juifs ont par ailleurs laissé leurs traces, comme la célèbre famille Pollack, dont le nom désigne l’un des pavillons de l’Université Laval. »
- Cette résidence transformée en lieu de culte sur l’avenue Mérici abrite aujourd’hui la synagogue Beth Israël Ohev Sholem.
Bien que ses racines soient très anciennes, la population juive de Québec est restée faible pendant de nombreuses années et les premiers efforts d’organisation ont été de courte durée. Ce n’est qu’en 1853 qu’un cimetière situé à l’extrémité ouest du boulevard René-Lévesque a été acquis et qu’un lieu de culte a enfin ouvert ses portes dans une salle.
Vers la fin du 19e siècle, la communauté devient suffisamment importante pour permettre la construction d’une première synagogue qu’on nommera Beth Israël (Maison d’Israël). Entre cette période et la Seconde Guerre mondiale, il y aura, dans la capitale, jusqu’à trois synagogues. « L’une sera fermée et les deux autres fusionneront au lendemain de la Deuxième Guerre pour s’établir rue Crémazie, là où se trouve aujourd’hui le théâtre Périscope. Sur le bâtiment, il est encore possible de lire le nom de la synagogue en hébreu », raconte le rabbin Lewin.
De nos jours, la congrégation Beth Israël Ohev Sholem converge avenue de Mérici, où une résidence a été transformée en lieu de culte. Les offices sont toujours célébrés en hébreu et l’emplacement sert, en outre, de Talmud Torah (ou école du dimanche) pour les enfants qui viennent y apprendre la tradition juive.
La Maison Chabad
Si la synagogue demeure un point de chute important pour la communauté juive de Québec, la Maison Chabad – une initiative relativement nouvelle – tend à le devenir aussi. Récemment déménagée sur Grande Allée Est, elle abrite Dovid Lewin, qui y réside avec son épouse et ses trois enfants; on la compare un peu à un presbytère.
« La Maison Chabad regroupe plusieurs services. Par exemple, le septième jour – ou jour de repos que l’on appelle Chabbat et qui s’étend du vendredi soir au samedi soir –, des membres de la communauté se retrouvent ici pour partager un repas. C’est également ici que sont organisées toutes sortes d’activités destinées aux étudiants juifs de l’Université Laval, qui représentent bon nombre de nos nouveaux arrivants », explique le rabbin.
M. Lewin, qui appartient à la grande famille des Shluchim chargée de développer des communautés juives de par le monde, vise aussi, à travers la Maison et son nouvel emplacement, à se rapprocher du tourisme juif. Comme il n’existe ni restaurant, ni épicerie typiquement juifs à Québec, il a participé à la mise sur pied de KosherQuebec.com, un service de livraison de repas kasher directement à l’hôtel.
À cet égard, le ministre du culte rappelle au passage que les Juifs qui se sont établis dans la capitale – des immigrants venus de l’Europe de l’Est il y a une centaine d’années à ceux, plus rares aujourd’hui, qui arrivent majoritairement de la France et de l’Amérique latine – ont dû relever, et relèvent encore, le défi de la conciliation de la vie juive et de l’intégration à leur communauté d’accueil.
« Même si on ne peut manger ce qu’on veut où l’on veut, qu’on observe le Chabbat le samedi et qu’il y a conséquemment des compromis ou des sacrifices à faire sur les horaires de travail et d’études, il y a moyen d’avoir une vie sociale intéressante et de bien vivre ici », termine-t-il en affirmant que la capitale offre « un cadre de vie idéal pour faire grandir une famille ».
Des noms juifs célèbres à Québec
Maurice Pollack : Immigrant d’origine russe arrivé à Québec en 1902, à l’âge de 17 ans, cet homme d’affaires s’est illustré dans le domaine du commerce en ouvrant un magasin à rayons sur le boulevard Charest qui devint très prospère, le magasin Pollack, mais qui, malheureusement, ferma ses portes en 1978. Aujourd’hui, le rez-de-chaussée de l’immeuble, qui a conservé sa fonction marchande, loge le centre commercial Place Cartier. Par ailleurs, l’Université Laval a nommé l’un de ses pavillons en mémoire de cet homme.
Marcel Adams : Arrivé dans la ville de Québec en 1951, l’homme d’affaires a fait fortune dans le domaine immobilier. En 1966, il a, entre autres, acquis le site de l’hôtel Loews Le Concorde, flairant que ce secteur deviendrait un jour très touristique et achalandé. Aujourd’hui, son fils Sylvan assure sa relève. Sa fortune est évaluée à 1,8 milliard, ce qui en fait l’un des hommes les plus riches du Québec.