C’est souvent par hasard, en se baladant dans les rues du Vieux-Québec, que les citoyens ou les touristes font la dé couverte de la rue Sous-le-Cap. Et cette rue ne manque pas de les surprendre ou de les étonner. La Nouvelle-France semble ne pas avoir pu s’échapper de cette étroite rue que surplombent des passerelles. Il n’y a pas d’autres rues comme celle-là à Québec.
AU PIED DU CAP DU SAULT-AU-MATELOT
De sombres passages permettent d’atteindre la rue Sous-le-Cap. Entre deux vieilles maisons de la rue Saint-Paul, on peut emprunter le passage de la Demi-Lune. Entre deux édifices de la rue du Sault-au-Matelot, l’escalier du passage du Chien mène à la rue Sous-le-Cap.
Tout en faisant une courbe, la rue Sous-le-Cap longe le pied de l’impressionnante falaise que les gens de la Nouvelle-France avaient pris coutume d’appeler le « cap du Sault-au-Matelot ». Les remparts de la rue des Remparts, édifiés au début du XlXe siècle par les autorités militaires britanniques, dominent la falaise. Il y avait au XVlle siècle une petite chute d’eau dans la falaise, ce que l’on appelait un « sault ». La légende veut qu’un jour, un matelot, ou un chien appelé Matelot, tomba au bas de la falaise, ce qui serait à l’origine du nom du Sault-au-Matelot. L’érudit toponymiste Jean Poirier se demandait en 2000 si le fameux matelot n’était pas Guillaume Couillard (1591-1663) qui vécut au haut de la falaise. Dans l’un de ses écrits, Champlain évoqua le fait que Couillard avait déjà été matelot.
D’UTILES PASSERELLES
La rue Sous-le-Cap apparut au temps de la Nouvelle-France, au XVllle siècle. Par cette rue, lorsque l’on venait de la place Royale et de la rue du Sault-au-Matelot, on pouvait se rendre au palais de l’intendant et au-delà. Des maisons furent érigées du côté nord de la rue Sous-le-Cap. L’estuaire de la rivière Saint-Charles étant beaucoup plus large que de nos jours, les eaux de la rivière atteignaient l’arrière des maisons lors des marées hautes. Les propriétaires, ne pouvant construire leur hangar à l’arrière de leur maison, les bâtirent plutôt du côté sud de la rue Sous-le-Cap, les adossant à la falaise. Pour relier leur maison à leur hangar, ils construisirent des passerelles au-dessus de la rue. Depuis lors, la coutume se poursuit.
UN MATELOT, DES CHIENS, UN CAP
Quoiqu’elle fût toujours dominée par le cap, notre rue ne s’est pas toujours appelée Sousle-Cap. Le plus ancien nom qu’on lui connaît est celui de « Petite rue du Sault-au-Matelot ». Ce qui la distinguait de la « grande » rue du Sault-au-Matelot. C’est le nom officiel qui apparaissait dans les annuaires de la ville au XlXe siècle. Toutefois, comme le rappelait James MacPherson Lemoine en 1875, les citoyens l’appelaient communément la « ruelle des Chiens ». Quinze ans plus tard, en 1890, l’abbé Louis Beaudet nous dit dans son guide de Québec que la rue est encore appelée Petite rue
du Sault-au-Matelot ou ruelle des Chiens, et ajoute que l’on a commencé à l’appeler aussi rue Sous-le-Cap. Avec le temps, ce dernier nom s’est imposé.
De nos jours, la rue Sous-le-Cap a un aspect propret et bien tenu. Mais il n’y a pas si longtemps, encore dans les années 1960, avec ses flaques d’eau, ses chiens qui aboyaient, ses chats maigres qui longeaient les murs, ses enfants pauvrement vêtus qui quêtaient et ses cordes à linge au-dessus de la rue avec leurs vêtements dégoulinants, la rue Sous-le-Cap avait un aspect misérabiliste. De vieilles gravures, photographies et cartes postales en témoignent.